05/09/2022
Fin août, Mécènes du Sud Aix-Marseille présentait, sur son stand à la foire internationale d’art contemporain Art-O-Rama, l’exposition D’autres oiseaux marchent eux aussi comme ça, de Giuliana Zefferi (lauréate 2019).
À la suite d’Art-O-Rama, l’exposition déménage et est exposée en deux parties à l’occasion d’actoral, pendant toute la durée du festival.
Rendez-vous du 9 septembre au 9 octobre 2022 à Montévidéo, et au 3 place Félix Baret - Marseille 6e.
Giuliana Zefferi
La pratique de Giuliana Zefferi est celle d’une exploration du geste à travers une histoire des formes et de leurs usages. Engagée au sein de projets collectifs dès 2010, sa pratique questionne de manière intrinsèque les protocoles de co-travail et fait l’objet de nombreuses collaborations. Après deux expositions avec le Palais de Tokyo, elle développe en 2013 à Marseille, invitée en résidence par l’association Astérides, les bases de son travail vidéo. En 2017, elle initie le cycle Après le geste, le grand dehors dont le film D'autres oiseaux marchent eux aussi comme ça est issu. Ce projet a été soutenu par le CNAP, la DRAC Ile-de-France, le DICRéAM, Mécènes du Sud et la Fondation des Artistes. En 2020, elle participe aux Révélations Émerige et développe en parallèle avec le collectif W une réflexion plastique et théorique sur le format de l'artothèque.
D’autres oiseaux marchent eux aussi comme ça
Giuliana Zefferi s’intéresse à la notion d’uchronie, c’est à dire au fait que l’histoire est histoires, parce que chacune aurait potentiellement pu tourner autrement. Elle fait ainsi l’hypothèse, dans le sillage du réalisme spéculatif, que la réalité pourrait être autre que celle que nous appréhendons, et que ce qui n’est manifestement pas advenu, existe toutefois aussi.
Dans une logique exploratoire, elle se base sur des recherches qui peuvent toucher à l’anthropologie, la préhistoire, la philosophie, la littérature, ou encore la musicologie. Elle développe une pratique transdisciplinaire, qui prend des formes graphiques, sculpturales et vidéographiques et s’attache à préserver la possibilité de réassembler ses œuvres pour générer et multiplier des récits inédits. Elle imagine des environnements conçus comme des espaces de latence, c’est à dire non-productifs, qui favorisent l’observation et l’introspection. Elle y fait coexister des formes sculpturales tangibles, du mobilier, des textes, et des vidéos qu’elle hybride.
À Montévidéo, l’installation D‘autres oiseaux marchent eux aussi comme ça* se nourrit d’une recherche intitulée Après le geste, le grand dehors en lien avec notre perception du temps. Elle y documentait des objets du quotidien dont la valeur d'usage remonte au paléolithique : couteaux, marteaux, fours, flûtes, sifflets, rames, pirogues, vêtements, ornements, aiguilles à chas, récipients, échelles et cabanes. On retrouve des images tirées de cette recherche parmi les éléments composites de la vidéo présentée dans l’installation. Elles forment des strates instables, laissant entendre qu’elles aussi sont soumises à la contingence. Sous tendant une temporalité multiple et complexe, Giuliana Zefferi emprunte différents régimes de narration : fiction, autofiction, documentaire, anticipation. Par le biais de collages, elle télescope images, animations, récits sonores. À l’image d’une voix intérieure, d’une double pensée, elle livre un dialogue fiction à partir d’interviews de chercheurs, de commissaires, d'artistes, de dîners entre amis, de dialogues de la vie quotidienne, et de paroles d'enfants. Il est soutenu par deux personnages et des artefacts préhistoriques en 3D.
Claude 77 ans est une figure militante du quartier de la Belle de Mai à Marseille, l'un des quartiers les plus pauvres d'Europe. Elle défend la culture comme pouvoir d’émancipation. Elle aurait pu être artiste. Jeanne, une artiste de 36 ans, vient d'emménager dans son premier appartement-atelier, elle aurait pu s'appeler Claude.
Au 3 place Félix Baret, l’installation prend une configuration quasi domestique qui induit la possibilité d’une présence à soi. Les sculptures sont des maquettes, envisagées comme des espaces mentaux : salle d’attente, chambre à coucher, des environnements où l’artiste se sent prédisposée à l’introspection et la spéculation, à la faveur d’une insomnie par exemple.
Certaines, conçues en miroir ou érigées, suggèrent la multiplicité des objets. Elles sont réalisées en papier mâché, récupéré dans les services administratifs des lieux d’art avec lesquels l’artiste a travaillé, une manière de sceller leur généalogie, et de les inscrire dans une histoire plus large. Leurs couleurs tranchées fonctionnent comme des repères chronologiques qui correspondent aux différents jours du travail d’atelier.
La notion de temporalité complexe, telle que Giuliana Zefferi l’envisage, dénie le caractère immuable et irréversible du temps, un énoncé qui influence son travail lui-même.
Les récits plastiques qu’elle compose nous invitent non seulement à expérimenter un état d’aperception mais postulent que nous avons une infinie liberté d’imaginer nos futurs.
— Texte : Bénédicte Chevallier
*Titre tiré du poème Walking Like A Robin, Mayer Bernadette [trad. Jean-François Caro)
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Exposition du 9 septembre au 9 octobre 2022
Avec le soutien et la complicité de Julie Clément, Vanina Veiry-Sollari, Alain Isnard, Olympic Location et actoral, festival des arts et des écritures contemporaines.
Diffusion vidéo
Montévidéo, 3 impasse Montévidéo, 13006 Marseille
Du lundi au samedi : 9h-19h30
Jusqu’à 00h pendant le festival
Exposition
Mécènes du Sud chez Alain Isnard, 3 place Félix Baret, 13006 Marseille
Du lundi au vendredi : 10h-12h / 14h-17h