11/06/2022
Les Vignes Buissonnières x Mécènes du Sud Montpellier-Sète-Béziers
Les 11 & 12 juin 2022, en Pic Saint-Loup
Avec : Pierre-Guilhem, Rébecca Konforti, Romain Ruiz-Pacouret, Dove Perspicacius et Sabrina Issa
En 2022, Les Vignes Buissonnières et Mécènes du Sud Montpellier-Sète-Béziers se sont associés afin d'offrir une proposition d’art contemporain composée d’œuvres conçues in-situ, à découvrir au fil d'une belle promenade œnologique et gastronomique à travers vignes organisée par le Syndicat de défense de l’AO Pic Saint Loup.
Cette année, et pour la première fois, des œuvres d’art ponctuaient le parcours imaginé pour les visiteurs.
Ces créations ont été pensées par des artistes de la région (Pierre-Guilhem, Rébecca Konforti, Romain Ruiz-Pacouret, Dove Perspicacius et Sabrina Issa) pour le magnifique écrin du Pic Saint-Loup, l'un des plus beaux sites naturels de l’Hérault.
Les artistes participant à la manifestation se sont rendu·e·s sur place, se sont imprégné·e·s et inspiré·e·s du lieu, de ses reliefs, de ses habitants et de son ambiance si particulière pour concevoir des œuvres inédites, invitant à la réflexion, et à la découverte de ce territoire sous un jour nouveau.
L’arbre, tissus, 9 x 13,5 mètres, 2022.
Pour commencer ce parcours à travers les vignes, dans un espace aux airs de clairière, une rencontre insolite…
Pierre-Guilhem présente un drapeau de la France de 9 mètres sur 13,5 mètres, dont les dimensions correspondent exactement à celles du drapeau flottant sous l’Arc de Triomphe, à Paris, dit de taille 1, soit la plus grande qui existe.
Symbole national, le drapeau tricolore français suit une nomenclature rigoureuse, ses couleurs sont précisément établies. C’est donc un signe fort et normé que l’artiste reprend, et utilise dans un contexte autre que celui dans lequel nous le côtoyons d’ordinaire.
Largement associé aux grands monuments, le drapeau est ici accroché à un arbre, déplacé dans un contexte géologique et inhabituel ; c’est une invitation à la réflexion que nous propose ici l’artiste.
Qu’est-ce qu’un territoire ? Qu’est-ce qu’un état ? Que représente le drapeau, et de quoi est-il l’emblème ?
Par le passé, Pierre-Guilhem a déjà mené une recherche sur le drapeau français. En changeant très légèrement les couleurs et densités des trois bandes monochromes, il questionnait déjà la portée d’un tel symbole.
Romain Ruiz-Pacouret & Rébecca Konforti
Vestiges, peinture sur bois, dimensions variables, 2022.
Depuis le domaine viticole, les vestiges des châteaux de Vivioures et de Montferrand se détachent du haut des reliefs environnants. Il y quelques jours encore, de grandes pierres planes étaient disposées au sol, à l’emplacement exact de l’installation de Rébecca Konforti et Romain Ruiz-Pacouret, comme ayant roulées au bas des collines, en provenance des anciennes habitations seigneuriales.
En choisissant de s’inscrire dans le paysage, de le prendre comme cadre et contexte, l’envie de travailler la question des ruines s’est imposée de manière évidente aux artistes.
Ils ont investi le lieu de divers éléments architecturaux, aux styles hétéroclites, dont les époques et les provenances se mélangent, faisant de cet ensemble de vestiges fictifs un champ de ruines spatio-temporel. Ces silhouettes d’architecture accueillent des motifs inattendus, un arbre y pousse, un nuage y passe, permettant à un espace autre de se développer au cœur même de ces éléments du bâti. Une manifestation du concept foucaldien de l’hétérotopie, ces localisations et espaces concrets qui deviennent des supports à l’imaginaire, à l’utopie et au rêve.
Rébecca Konforti et Romain Ruiz-Pacouret travaillent seuls ou en duo. Ils considèrent que l’individu doit exister en dehors du collectif, et leurs collaborations fonctionnent toujours comme la rencontre de leurs travaux respectifs.
Équipe de nuit, grès ramassé dans le Gard enfumé, châtaignier brûlé,
20 x 220 x 20 cm (deux fois), 2022.
Une brèche ouverte dans une barrière rocheuse permet au regard de se perdre sur les falaises de l’Hortus. Cette vue, encadrée de part et d’autre par deux chouettes perchées sur des piliers de châtaignier, laisse l’esprit divaguer, se raconter des histoires.
Oiseaux emplis de mystère, parfois obscurs, symboles de sagesse dans la mythologie grecque, les chouettes n’en restent pas moins des animaux discrets, que l’on aperçoit rarement. C’est souvent uniquement grâce à leur hululement que le marcheur nocturne découvre leur présence.
Avec cette œuvre, Dove Perspicacius souhaite rendre visible ces êtres invisibles, qui partagent notre territoire mais que nous ne rencontrons pas, ou si peu : paradoxalement, ces chouettes de terre, brûlées et noircies par le feu semblent déjà disparaître, et leurs contours s’atténuer, comme dans un rêve. À l’image de la grotte de l’Hortus qui, elle aussi, malgré son existence tangible, ne peut être qu’imaginée depuis ce promontoire.
Pour Équipe de nuit, l’artiste a collaboré avec Antoine Vandendriessche. Ensemble, ils ont ramassé sur leur territoire, les Cévennes, les matériaux nécessaires à leur création : argile extraite du sol, bois coupé dans la forêt près de chez eux, avant de leur donner forme, et de les enfumer.
Confondre le temps : L’assise et L’aperception, installation, L’assise ( 200 x 145 x 81 cm sur 81 de hauteur), L’aperception ( environ 1 mètre de diamètre sur 18 cm de hauteur), Bois de pin douglas naturel, torche (chalumeau), gaz, huile de lin & térébenthine, découpe de pmma 5mm, gélatines, métal, câbles, ampoules, 2022.
Une source lumineuse plane au milieu des arbres au-dessus d’une table et de bancs de pique-nique, carbonisés. Cette source de lumière arbore les couleurs avec lesquelles l’abeille capte le spectre du visible. Ce sont les couleurs avec lesquelles se construisent sa perception et son interaction avec son environnement, pour lui permettre, entre autres, de polliniser des plantes à fleurs.
Sabrina Issa s’intéresse aux végétaux depuis des années. Ses recherches l’ont peu à peu poussée à se concentrer sur une autre manifestation du vivant : les insectes. Ses derniers, et notamment les abeilles, ont co-évolués avec les plantes depuis 120 millions d’années, s’adaptant et se développant ensembles. Ainsi, en observant une plante, notre perception est faussée, ses couleurs n’étant pas faites pour le regard humain, à l’image de l’ultra-violet, une couleur invisible à nos yeux, mais que les insectes, eux, peuvent appréhender.
En usant de la technique, et révélant ici le cercle chromatique de l’insecte, Sabrina Issa tente de voir ce que les choses ont à dire pour elles-mêmes. Elle invite au décentrement, et démontre que notre perception est arbitraire.
Pierre-Guilhem, L'arbre, 2022. Photo : Pierre-Guilhem.
Pierre-Guilhem, L'arbre, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Dove Perspicacius, Équipe de nuit, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Dove Perspicacius, Équipe de nuit, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Sabrina Issa, Confondre le temps : L’assise et L’aperception, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Sabrina Issa, Confondre le temps : L’assise et L’aperception, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Sabrina Issa, Confondre le temps : L’assise et L’aperception, 2022. Photo : Cédrick Eymenier.
Rébecca Konforti & Romain Ruiz-Pacouret, Vestiges, 2022. Photo : Romain Ruiz-Pacouret
Rébecca Konforti & Romain Ruiz-Pacouret, Vestiges, 2022. Photo : Romain Ruiz-Pacouret